El Rincon MadreTierra
Traduisez ce titre par « Le coin de la Terre Mère » C’est également le nom de la ferme où je me suis arrêté, voilà plus d’une semaine.
Comme je le disais déjà, l’Argentine ne sera peut-être pas le pays qui apportera le plus au cadre du projet « Paysans du Monde » Mais du Sud Chili il aurait été dommage de ne pas profiter de quelques semaines en Argentine, tentant d’y établir quelques contacts.
Je me suis appuyé jusqu’à présent essentiellement du réseau WWOOF afin d’enrichir mes connaissances en pratiques agricoles écologiques comme la permaculture (enrichir ou plutôt m’initier !) Je m’arrêterai éventuellement dans un prochain article sur ce réseau et la notion de volontariat. Voilà donc comment je suis arrivé ici, à Rincon Madre Tierra, à Tunuyan (prononcer Tounouchan) à 80 km au sud de Mendoza. Attiré avant tout par la description lue sur le site internet, parlant de Biodynamie, de permaculture et d’éco-construction. Je fus surpris de passer la première semaine à réaliser des bancs pour un sauna, sans pouvoir toucher à la terre.
Mais après cette semaine, ce que j’ai pu apprendre et trouver ici est peut-être plus important encore. Jorge et Asuzena, nos paysans accueillants, mènent et pensent leur projet comme un tout, un ensemble dans une relation à la terre. Jorge nous a dit être « le gardien de ce lieu et non le propriétaire. Le gardien dans son rôle de protection, d’écoute et de vie en harmonie. Non le propriétaire, celui usant la terre comme un simple support de production, celui qui use la terre tout simplement. » L’alimentation et la spiritualité sont au cœur de ce projet, de leur vie. De la consommation excessive de viande, comme beaucoup d’Argentin, Jorge est passé au régime végétarien et suivent avec Asuzena le chemin de la « comida viva » Une alimentation uniquement crue, rien n’est cuisiné et tout aliment en provenance animal est proscrit. Asuzena est également nutritionniste de profession et vous explique l’intérêt d’une alimentation saine, de la possibilité de soigner des maladies par l’alimentation. Jorge est également professeur de yoga et vous sensibilise à cette pratique pour les volontaires qui souhaitent la découvrir.
Ces rencontres vous permettent de comprendre le choix et les convictions de ces personnes, sortant des clichés et stéréotypes, apportant la réflexion sur ses propres modes de vie. Bien au-delà encore, ces orientations sont liées au refus d’un modèle oppressant et imposé, qui s’effondrent petit à petit mais que l’on tente de maintenir sous perfusion. Etre végétarien me pose tout de même des questions dont la principale est de comprendre comment il permettra aux paysans de zone de montagnes, des hauts plateaux des Andes, de maintenir leur activité économique, de rester sur leur terre, lorsque rien ou presque ne pousse ? Cette discussion nous l’avons eu avec Jorge. Pour lui se serait une utopie de croire qu’un jour le monde ne sera que végétarien. Mais tout comme lui, je crois en notre changement essentiel de consommation. Favoriser les viandes provenant d’une agriculture biologique et locale, sans en consommer chaque jour, participera à la diminution des élevages intensifs et de la déforestation, pour la production notamment de soja (très souvent OGM en Argentine !) qui participe fortement à l’expropriation des paysans et communautés locales.
Une nouvelle approche se pose dans ce voyage, celle de l’alimentation comme facteur du bien être individuel. Bien qu’elle fût fortement liée depuis le début, elle a pris ici une autre dimension. Sans en arriver dans les excès d’un côté comme de l’autre, peut-être sera-t-elle au cœur du changement de nos sociétés.